vendredi 21 avril 2017

Roger de Laron et le ''Grand Oeuvre'' -9/.- La Dame dans le conte: Reine et Fée.

Si le Roman de la Rose, La Divine Comédie et l'Amour courtois, sont connus et partagés par Marguerite et Roger de Laron ; les gens du Limousin, en ce XIVe siècle, connaissent en priorité ce qui se dit dans les veillées, dans les conversations, et à l'église du village... On y parle plus de diableries et de féeries, que de littérature ; plus de sorcellerie que d'alchimie …

Pourtant dans l'imaginaire, les fantasmes et dans les contes ; la place de la ''Dame '' reste essentielle...
En ce temps, le héros chevalier, a quitté sa terre, pour celle d'Avalon et la cour de Morgane. Attiré par sa bonne fortune ; le chevalier sait cependant que de la Terre d'Avalon : on ne revient pas ! « Puis que fortune en ce lieu me poursuyt / O dieu puissant, je voys appertement / Qu’il me faudra succumberau torment / De triste mort... »
C'est que la fée Morgane affiche un caractère ambigu... dans ''Le roman de Merlin'', elle apparaît comme : « Et sans faille elle fu bele demoisele jusques a celui terme que elle commencha apprendre des enchantements et des charroies ; mais puis que li anemis fu dedens li mis, et elle fu aspiree et de luxure et de dyable, elle perdi si otreement sa biauté que trop devint laide, ne puis ne fu nus qui a bele le tenist, s’il ne fu enchantés »

Avec Morgane, c'est l'Amour ou (et) la Mort ! Rappelons-nous Morgane qui enlève à trois reprises Lancelot et tient enfermés les mauvais amants dans le 'Val sans retour'. Ainsi, cette Morgue malfaisante s’affirme comme l’ennemie des valeurs de la fin’amor... Et, il y a débat entre l'adultère revendiqué en pays d'Oc et le mariage imposé en pays d'oïl...
La femme attendue en notre campagne, serait davantage celle qui offre un amour loyal et ferme, et scellé dans le mariage...
Aussi, dans le comte; la dame impose au chevalier une épreuve symbolique avant qu'il ne pénètre... plus avant: « Car il convient avant que de t’esbatre / Dedans mon regne aux fiers luictons combatre ». Dans cette prise de la forteresse, on reconnaît la traditionnelle allégorie sexuelle, d'autant que l'objet de la quête réside dans la possession de la dame...
Le chevalier vainqueur, Morgane le fait entrer « dedans fairie » : royaume de la fête, avec banquet et chant des fées... L'homme se délecte de l'ambroisie, boisson des dieux ( et censée rendre immortel celui qui y goûte), et Morgane lui offre l'anneau d’immortalité... Et, peut-être, pour qu'il ne la quitte pas, également une couronne d'oubli : objet féerique qui traduit également le fait que le chevalier est devenu Roi.
Pour le mariage, il revêt un vêtement de velours bleu brodé d’or, confectionné par la fée. Et Morgane, présente les traditionnels éléments féeriques d'une robe précieuse... « Elle exhorna son corps d’ung blanc Samis. Ses blonds cheveulx jusqu’en terre espandu / Maintz Chevaliers esbahys ont rendus.. »...
La fée a « le cueur net & pudicque. » et en même temps « Ce qui faisoit la belle consentir / Au jeu d’amours, et chaste feu sentir. »
Le mariage se clôt sur le traditionnel tournoi.
Au matin, le chevalier-roi découvre son domaine ; et s'engage dans de nouvelles épreuves Morgane lui annonce maintes étranges aventures sur cette terre, dont seul le meilleur chevalier saura venir à bout. Il devra s'enfoncer dans les entrailles de la terre et combattre des dragons... D'autres batailles rappellent certains épisodes du Roman de la Rose : non seulement l’assaut de la forteresse de Jalousie, mais également l’entrée dans le verger de Déduit... Une descente aux enfers, permettra sans doute au héros d'atteindre le paradis..

On peut ajouter que le roi-chevalier amant courtois par excellence, qui voit ses forces décuplées lorsqu’il pense à sa dame (Puis la beaulté de Morgue son amye, / Sa force rend en ce non endormye) et vainc les serpents et entre au jardin d’immortelle plaisance. Il a donc acquis ses terres par sa prouesse et non par son union avec la fée.
Après avoir gagné le mariage, le droit de régner, il reste le temps du pouvoir, en veillant à ne pas sombrer dans la ''recréantise'' ( paresse, qui l'amènerait à délaisser l'idéal chevaleresque) .


Sources : Morgue, fée de cour ? La féerie courtoise dans le Livre des Visions d’Oger le Dannoys au royaulme de Fairie de François Habert, par Alexandra HOERNEL

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire