mercredi 30 mars 2016

Jésus dans un salon bourgeois

« Le tableau de Jean Béraud (1848-1935) fit scandale lorsqu’il fut exposé à la Société nationale des beaux-arts en 1891.
Ce tableau peut déranger, encore aujourd’hui, par l’anachronisme radical consistant à montrer ­Jésus, vêtu à l’antique, dans un dîner mondain au milieu d’une assemblée d’hommes en habits noirs.
Mais ce qui scandalisa, ce fut moins cette transposition, courante dans l’histoire de l’art que le fait d’avoir donné à ces contemporains des traits parfaitement identifiables.

La scène se déroule en 1891, dans un intérieur bourgeois : Renan (au centre de la table, une serviette autour du cou) préside un dîner mondain où figurent nombre de personnalités parisiennes, dont le chimiste Eugène Chevreul (mort l’année précédente à 103 ans) avec lunettes et favoris grisonnants, et Alexandre Dumas fils, appuyé au dossier d’une chaise. A ce dîner assiste le Christ, dont les traits ont été immédiatement identifiés à ceux du journaliste et militant socialiste Albert Duc-Quercy (1856-1934), aux pieds duquel se prosterne, à l’heure du café, une Madeleine repentante qui n’est autre que la demi-mondaine Liane de Pougy, laquelle, réellement repentante, finira ses jours au couvent.

Le titre du tableau donne Madeleine comme personnage principal, et oriente sa lecture vers le débat autour de la prostitution, qui s’était si fortement développée au fil du siècle. Et on ne peut s’empêcher de penser que la plupart de ces messieurs à la mise impeccable devaient fréquenter les maisons closes. »


Sources la Croix du 20 mars

dimanche 27 mars 2016

Ta mort, ma mort... -2/5-

Ce qui correspondait à l'art de bien mourir dans notre culture occidentale, de cet art de l'accompagnement de la mort, et de l'après-mort, a disparu. 

Anecdotes : ( 80% du temps d'intervention de B. Durel est occupé par la racontée de témoignages, d'anecdotes … : insistance de l'expérience, sur le concept …) :

* Calcutta. Bernard vit  un mois et demi à Calcutta, chez Mère Teresa,  près des frères de Mère Teresa, branche masculine. Lors de la deuxième visite, un jeune est  mort : « je l’avais vu la fois d’avant : les jeunes m’emmènent à une tombe  avec croix et couronne de fleurs ; retour au groupe, tous ces jeunes dansent et jouent comme d’habitude ».



La mort de Frida Khalo




** Autre exemple. Une jeune femme  se précipite le  matin, avant de se rendre à un enterrement. Elle était bardée de diplômes, mais  c’était la première fois de sa vie qu’elle allait être en proximité avec la mort.  Contraste entre ces jeunes « familiers de la mort » en Inde et cette femme jeune occidentale.   Un étudiant  raconte : «  en 10 ans d’études de médecine, pas seulement une heure de conférence sur la mort »


*** Nouvel exemple. Une femme dont le mari s’était suicidée, est invitée à un mariage ; elle prend prétexte d’un mal de dents pour ne pas venir.  Alors que dans la génération précédente, cette femme aurait été protégée dans son deuil. Elle aurait été habillée de noir, avec de nombreux signes du deuil, et personne ne l’aurait invitée. Actuellement  après un deuil, on retourne au travail, sans que rien n’en paraisse.


La mort est occultée... Autrefois pour parler de la naissance fruit d'une expérience sexuelle, on parlait de ''cigognes'' à l’oeuvre..etc. Aujourd'hui, c'est la même chose pour la mort ; on préfère les images … équivalentes aux cigognes ..: « Grand-Mère est partie en voyage ... »

On considère même comme une forme de maltraitance que d’inviter les enfants à une sépulture !

"Quelqu'un meurt et c'est comme un silence qui hurle..." Mais , si la mort nous aidait à entendre la fragile musique de la vie ?

La première rencontre avec La Mort, c'est la mort de l'autre, avant notre propre mort : Deux 'mort' : le même mot mais une expérience différente... !



Traditionnellement, on priait pour avoir une mort ''annoncée'' pour se préparer, se réunir autour du lit du mourant... Aujourd'hui on préfère mourir subrepticement … !

A suivre ...

vendredi 25 mars 2016

Ta mort, ma mort... -1/5-

De retour d'une session à St-Jacut de la mer, avec Bernard Durel ( o.p.) : Pratique du Zen, et réflexion sur la mort...
( Cette transcription est personnelle ...)
Les disciples interrogent le 'maître' sur ce qu'il y a après la mort.
A chaque fois, il répond : « je ne sais pas »
Des disciples s’interrogent sur les possibilités du maître... L'un d'eux finit par lui dire:
« Vous êtres maître , et vous ne savez pas … !? »
Le maître répond : « Je suis un maître, mais pas un maître mort... »
Il n'y a pas d'expert de la mort

A la question « Y a t-il une vie après la mort ». La réponse est : « Y a t-il une vie avant la mort ? »

Si on ne peut décrire ce que serait ''l'après-mort'', la mort, elle, peut s'observer tous les jours.



Le message essentiel de cette session, sur la mort, me semble être un message de vie. L'expérience de ce passage par la mort, ne nous est pas accessible. Nul d'entre nous, les humains, n'a pu nous en entretenir.. ! Mais, si je ne peux pas avoir fait l'expérience de ma propre mort ; je peux vivre la mort de mes proches... Et, cette mort est une leçon de vie … Sur la mort, mes maîtres sont ceux qui m'ont précédé, et ceux qui témoignent de ce chemin ...

Quel est l'intérêt de réfléchir à la mort... A sa mort … ?
On pourrait éviter d'en parler, puisqu'on n'en sait rien … ! Je me demande combien de temps, nous pourrions ainsi l'éviter... ? La mort est là, dans l'impermanence de toute chose .. Elle est là, autour de moi, plus ou moins proche ...
«  Il arrive qu’au milieu de la vie  la mort vienne  prendre ses mesures et la vie continue, mais le costume se coud irrémédiablement.»  (Thomas Trauströmer).
Le grand intérêt de la mort, est de nous faire réfléchir à notre vie … !



Le mourant peut être comme un 'maître spirituel' … 
Et la méditation, pour nous préparer à la ''vigilance'' : être surpris, mais prêt... !

A suivre ...

mardi 22 mars 2016

Carl Spitzweg - peintre -


Carl Spitzweg est né en 1808, poète et peintre, il est parmi les plus chers du peuple allemand.
Je retiens ses œuvres à l’ambiance unique et aux personnages colorés, bien souvent excentriques. En général, son style n’est pas dénué d’humour.


Il est d'abord pharmacien, et sa formation est celle d'un autodidacte à partir de 1833. Grand voyageur, il séjourne en Dalmatie (1839), à Prague, et à Venise (1850).
Spitzweg réside surtout à Munich. Ses scènes de genre, de format modeste, dépeignent avec minutie et humour la vie des petits-bourgeois égarés et gauches avec parfois des effets picturaux réalistes empruntés aux Néerlandais du XVIIe s. En 1851, il voyage à Paris et à Londres. Dans ses paysages, son style souple et son coloris séduisant rejoignent les recherches du Pré-Impressionnisme. Isolant volontiers un personnage unique dans la nature, Spitzweg donne à ces paysages un caractère sentimental et personnel qui rappelle le Romantisme.

En 1865 pour raison de santé il cesse ses voyages et reste à Munich. Il est mort en septembre 1885.  







samedi 19 mars 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-5/.-

La religion, un art de vivre...



Une discussion sur ''Dieu'' avec des 'incroyants', ou des 'indifférents', se heurte inévitablement au mur du temps : l’Éternité ?, la vie après la mort ? La résurrection... ? Des énigmes, qui ont vite fait de nous rendre incompréhensibles, inaudibles les uns aux autres …
- Sur le plan scientifique, l'idée même du temps, ne peut être prise comme un absolu, ce serait une illusion nous en avertit Einstein. Le philosophe Kant constate : « Le temps n'est pas une réalité objective. Il n'est ni une substance, ni un accident, ni une relation, mais une condition subjective résultant nécessairement de la nature de l'esprit humain. »
Ceci dit ; je peux me permettre de continuer, et demander à mes interlocuteurs d'admettre, disons un peu de 'flou', un peu de 'poésie' ( pour le moins …)
Un homme cherchant l'immortalité,  Une femme cherchant l'éternité - de Bill Viola
« En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu'Abraham fût, je suis. » Jean 8,58. Jésus appréciait pleinement le mystère du temps présent...

Un chrétien qui parle du ' Royaume ' parle aussi d'Eternité... Attention ! l’Éternité n'est pas une très-très longue période de temps ( ennuyeuse vers la fin …!:-) )
Jésus est ainsi interrogé par les sadducéens ( à lire le chap 22 de Mat. v.23-33)... Jésus dit ce que ce n'est pas... et très peu de ce que c'est « on est comme des anges dans le ciel », ce qui ne nous avance pas vraiment … S'agit-il d'un koan... ?
Jésus suggère que Dieu, « n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants. » . La question de la vie dans l'au-delà, n'a pas de solution … ( et c'est ce que dit le Bouddha).
L’Éternité se serait vivre l'instant. Cet instant qui semble déjà n'être plus là, dès que je l'évoque …
« Le Royaume est dans la zone de la non-pensée 


» K. S. Leong

S'il y a une expérience ( parmi beaucoup d'autres, personnelles selon chacun de nous) qui pourrait nous évoquer cette non-pensée, ce non-temps... Ce pourrait être le sexe... Il est curieux que c'est précisément cette expérience qui a été la plus honnie des religions … ! 
Cette expérience à deux, dans l'idéal de son accomplissement s’apparente à la mort de l'égo...

L’avènement de ce ''Royaume'', n'est pas évoqué comme devant se produire à la fin des derniers jours : « L'avènement du Royaume de Dieu ne se laisse pas observer, et on ne saurait dire : ''Le voici'' ! Le voilà !'' car sachez-le, Le Royaume de Dieu est au milieu de vous. » ( Lc 17, 20-21)
Aujourd'hui nous dirions, le Royaume est dans l'ici et maintenant... Que de rapprochements à faire avec le dialogue de deux éminents maîtres zen, Chao Chou et Nan Chuan, sur le Tao... ( Voir article suivant) !


Dans Luc, au chap 10, 38-41. Jésus nous indique l'objet de la meilleure part que vit Marie... Il ne s'agit pas de savoir s'il vaut mieux ''servir'', ou ne ''rien faire'' ( contempler...) ... C'est hors sujet... La meilleure part ici, c'est celle de l'Attention : être là dans le moment présent... Marthe qui « s'agite à beaucoup de choses », a perdu le fil, elle se trouble, devient anxieuse...

Est-ce que je cherche la renommée, la fortune, le plaisir, le loisir illimité ? Si je l'obtenais, serais-je heureux ?. L'art d'être, serait – selon Jésus – de vouloir ce que j'ai... Le bonheur n'est pas un bien, ce serait plutôt une disposition à … Le verbe aimer au présent est indispensable au bonheur...
« Changer votre cœur, car le Royaume des cieux est tout proche » ( Mt 4, 14)

« L'avènement du Royaume de Dieu ne se laisse pas observer » (Luc 17, 20)

Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles '' 

mercredi 16 mars 2016

Le Royaume est comme le Tao



Chao-chou asked Nan-chuan, “What is the Tao?”

Nan-chuan said, “Everyday mind is the Tao.”
Chao-chou said, “How can I approach it?”
Nan-chuan said, “The more you try to approach it, the farther away you’ll be.”
“But if I don’t get close, how can I understand it?”
The Master said, “It’s not a question of understanding or not understanding. Understanding is delusion; not understanding is indifference. But when you reach the unattainable Tao, it is like space, limitless and serene. Where is there room in it for yes and no?”



Si je l'adapte à notre vocabulaire, je traduirais ainsi :

« Chao chou, venu étudier la spiritualité auprès de Nan chuan, lui demanda :

"Qu’est-ce que le Royaume au juste ?"
"L'esprit de tous les jours est le Royaume'' lui répondit Nan chuan.

"Comment l’atteindre ?" continua Chao chou.
"A vouloir l’atteindre, déjà tu t’en écartes" répondit Nan chuan.

"Mais sans cette volonté comment Le connaître ?" demanda Chao chou.

Nan chuan répondit :
"Le Royaume n’est pas plus un objet de connaissance que de non-connaissance.
Penser le connaître est une compréhension erronée 
et l'ignorer est insensé.

Si quelqu'un aspire au Royaume sans se tromper, alors son esprit sera comme l'immensité de l'espace, un ciel immensément vide... 
elle est comme un ciel immensément vide.


Pourquoi, alors, s’égarer entre le vrai et le faux ? »

Illustrations: Li Xiaokun (1949-) rajza 

dimanche 13 mars 2016

Gregoire Kenne – peintre -


Grégoire Kenne est né en décembre 1951, aux Pays-Bas. Il a étudié à l'Académie des Beaux-Arts à Amsterdam de 1967 à 1973.

En 1973, il remporte la médaille d'argent du Prix de Rome.




G. Kenne représente des natures mortes , mais aussi des scènes de théâtre de la Commedia dell 'Arte... Il y a de la beauté, mais aussi de la tristesse, de la désintégration...



Ses personnages, en contraste frappant avec les vêtements de fête, expriment la solitude, le désespoir et le désir trahi.






Dans ses natures mortes, l'humain manque … Elles s'apparentent à des trompe-l’œil, avec des perspectives inhabituelles.












Rencontre, une femme, un homme ...





jeudi 10 mars 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-4/.-

Reprenons, la suite des 'caractères' d'une Religion ( du zen, ou d'une autre …), après – la Présence, -l'Ordinaire, - la Saveur et le Discernement … ( article précédent). 

… Heu, sans doute, vous dites-vous : « pour définir une religion, je n'aurais pas pensé à ça... Oui, mais... Nous sommes au XXIe s., et la Religion ( aussi) change... ( ici, je parle 'religion', et non 'foi')... Bon, continuons …

- le Non-agir, le Lâcher-prise … ( en chinois, le Wu-wei) : le véritable art est '' sans but, et sans utilité ''. Nous retrouvons cela dans le 'sermon de la Nature' de Jésus, sur les oiseaux sauvages, les lis des champs, et dans Mt 11, 28-30 : « Mon joug est aisé et mon fardeau léger... »

- La Douceur : « cela veut dire suivre la voie de la nature et non s'y opposer » K. S. Leong. Cette douceur est manière de reconnaître la nature de la réalité : exemple, le mort...
Jésus se demande pourquoi, ce que les animaux sont capables de faire, nous ne pouvons le faire … ?
La spiritualité n'est pas une question de volonté de puissance, il s'agit plutôt du pouvoir de la faiblesse ...

- La Liberté. Attention, n'oublions pas que liberté et contraintes sont exactement les deux faces d'une même réalité … ! Il s'agit ici surtout de se libérer soi-même des liens tissés par notre propre ego.

La Simplicité. Et non l'agitation. Sobriété, et non accaparement … Le non attachement … « Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume des cieux » ( Mt 19, 24)
Quelle que soi sa nature ( matérielle, psychologique,intellectuelle, ou même religieuse ..) aussi longtemps qu'il y aura attachement, il sera obstacle à la libération... « Heureux les pauvres en esprit »( Mt 5, 3)... Il ne dit pas que les pauvres sont heureux … ! Ni que tous les pauvres sont des saints … !

- Le Paradoxal :
Mat 4, 25, Mt 11, 25-26), 1 Cor 1, 20-25, ...
Le paradoxal découle souvent de l'incapacité du langage à dire deux choses à la fois...
La sagesse du 'Koan' … La folie est sagesse, la faiblesse est force …
Ici, la logique laisse place au ''vague '', A et non A peuvent coexister ...

- Le caractère créatif, artistique de la religion. Son aspect yin et yang, mais, plutôt tourné vers le cerveau droit, donc artistique, féminin, … Jésus recourt à la leçon de la nature, du quotidien; et il recourt également au raisonnement.

- La profondeur de l'expression. « La religion pourrait être associée à une série particulière de dogmes, croyances, règles et rites. En tant que telle, elle tendra à être formelle, institutionnelle et politique par nature. La spiritualité, par contre, s'attache à ce qui est profond et spirituel. Elle a moins à faire avec ce qui nous est imposé de l'extérieur qu'avec ce que nous révélons de notre intérieur. » K. S. Leong

L'enseignement de Jésus, au-travers des Évangiles, nous offre une spiritualité qui regroupe bien cette dizaine de caractères, qui nous préparent à la quête du Royaume...

Cette dizaine de caractères d'une Religion ( du zen, ou d'une autre …) sont extraits de :

Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles ''