samedi 18 juin 2016

Des Evangiles au Mythe de Salomé... -2/4-

Si l’historien Flavius Josèphe est le premier à donner le prénom de Salomé au personnage de la danseuse, les Pères de l’Église chrétienne vont exploiter les ellipses du récit fondateur biblique pour donner à cet épisode une portée didactique moralisatrice. À l’époque, la femme est considérée comme une menace, et une tentatrice. L’archétype de cet imaginaire féminin est Ève, coupable du péché originel.
tympan du portail saint Jean
de la cathédrale de Rouen, XIIIe siècle
Salomé apparaît encore comme le pendant négatif de Judith. Le livre d'Esther (Marc,6, cf. Esth, II, 9 ; Marc, 6, 23, cf. Esth., V, 3)

Jean Chrysostome et Augustin d’Hippone (IV-Ve siècle) sont à l’origine des caractéristiques du personnage de Salomé développées plus tard et reprises dans la littérature : la danseuse perverse, la femme fatale et l’incarnation du vice.

Un extrait de l'Homélie 24 sur l’Évangile de Matthieu de Saint Jean Chrysostome, montre que si les écrivains des XIXe et XXe siècles ont vu en Salomé le mythe de la femme fatale, leur vision est peut-être en rapport avec ces commentaires d’hommes d’Église. De plus, ce sermon illustre la misogynie qui fait de la femme un être dangereux, associé au démon et au mal, représentant la luxure et le vice.
Benozzo Gozzoli, La Danse de Salomé,
Washington, National Gallery, 1461


Sous la plume de Saint-Augustin, Salomé se livre en toute conscience à une véritable bacchanale et mérite logiquement un châtiment sans appel. Celui qu’Augustin invente se révèle d’un symbolisme flagrant : Salomé meurt décapitée par les glaces d’un fleuve gelé. Sa mère n’est pas épargnée par un destin tragique mais au combien moral : c’est en aveugle qu’elle termine ses jours, réminiscence sans doute de l’errance d’Œdipe après la révélation de ses propres crimes d’inceste et de parricide.



Salomé et le XIXe siècle.
Si le mythe de Salomé a connu un véritable succès au XIXe siècle c’est sans doute d’une part grâce au mouvement littéraire qui caractérisait cette époque : le symbolisme.
Salomé, Lucien Lévy-Dhurmer, 1896


L’évolution du mythe s’est aussi faite grâce au développement des droits de la femme au sein de la société du XIXe .
« Il faut voir dans le développement du féminisme au XIXe siècle l’un des facteurs de la réactivation de ce mythe. Du fait qu’elle revendique sa part des droits de l’homme et du citoyen, la femme est apparue d’autant plus dangereuse au regard de l’idéologie conservatrice que la séduction (danse de Salomé) a pour fin inéluctable la castration (décollation de Jean-Baptiste) » Daniel Grojnowski et Henri Scepi : Cité par Pascal Agrien, « Salomé, un mythe littéraire » [en ligne] http://dma1.over-blog.com/articlesalome-un-mythe-litteraire-97398714.htm

Les auteurs germaniques ont enrichi le mythe, au XIXe siècle, de l'amour de Salomé pour Jean-Baptiste et du scandaleux baiser à la tête coupée. Oscar Wilde inventera ensuite l'expression de la Danse des sept voiles.

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