samedi 27 février 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-3/.-

On peut tenter d' isoler une dizaine de caractères propres à la Religion : Le christianisme étant un exemple de religion ; c'est la mienne... On peut faire le même exercice avec le Zen, l'Islam ou le Judaïsme ...

 Le Sermon sur la montagne,
un tableau de Karoly Ferenczy (détail, 1896)
Le premier caractère de la Religion, est la Présence à soi, aux autres, à notre environnement … «  la lampe du corps, c'est l'oeil » Jésus demande de prêter ''attention'' ( aux enfants, aux oiseaux, aux lis …).

Le deuxième caractère, est l'ordinaire. Jésus répugne aux signes extraordinaires. Le premier des signes, est la résolution d'un simple problème d'intendance aux noces de Cana … Jésus guérit par compassion, sans désir d’impressionner … Jésus n'est pas un faiseur de miracles ! De même que l'Art est la magie de l'ordinaire...

Le troisième caractère est la saveur. L'enfant est peu conditionné, il a peu d'attachement … Il s'émerveille … L'enfant est magicien...

Le quatrième caractère de la Religion est le discernement. Discerner, c'est chercher à voir au-delà : « L'artiste ne reproduit pas ce qui est visible ; il rend visible les choses » Paul Klee.
«  la vérité vous rendra libre » nous dit Jésus ( Jean 8,31). 
Trois points essentiels de cette Vérité : il ne s'agit pas de croyance ici, mais bien de discernement... 
- 1er : Les oiseaux, les fleurs... métaphores du ''sans pourquoi'' de la Rose... du jeune enfant …. 
- 2ème point : Beaucoup de choses importantes de la vie sont hors de notre contrôle... « Qui d'entre vous peut, en s'en inquiétant, ajouter une seule coudée à la longueur de sa vie. » ( Mt 6, 27). L'accepter nous conduit à la paix intérieure... 
- 3ème point : «  à chaque jour suffit sa peine... » ( Mt 6, 34)
Discerner, voir : il n'est pas utile ici d'argumenter, de croire. La priorité est de voir ce qu'il y a ''à voir''...
Oui … facile à dire... ? Mais, comment faire... ? C'est précisément, à cette question, que j'attends la réponse de ma Religion :
Parmi plusieurs outils, je cite : - la contemplation d'un texte biblique ( ignatienne), - la méditation, l'oraison, la prière ...


Attention : le sermon de la Nature, de Jésus n'est pas un enseignement sur ''la providence''. Selon, cette interprétation, une sérénité personnelle reposerait sur la ''croyance '' que « Dieu pourvoira à tout ».

« Il s'agit alors d'une croyance, et non d'un discernement c'est à dire d'une compréhension du présent – car il n'y a aucune preuve que Dieu pourvoira vraiment … ! L'inconvénient est que ceux qui comptent sans cesse sur l'aide de dieu sont toujours en attente d'un Dieu qui sert leur propre intérêt. Ils se mettent eux-mêmes avant Dieu... » K. S. Leong
«  Chercher d'abord le Royaume de Dieu et sa justice », c'est mettre Dieu à la première place !
C'est une totale et inconditionnelle acceptation de la réalité... du présent.
Pour l'avenir, il s'agit là de notre responsabilité, et notre souci du bien commun …et donc, d'action.
( à suivre..)

Cette dizaine caractères d'une Religion ( du zen, ou d'une autre …) sont extraits de :

Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles '' 

dimanche 21 février 2016

Peut-on être sauvé tout seul ? -2/.-

A l'époque de Jésus, le risque me semblait être à l'opposé d’aujourd’hui. L'idée du salut collectif, de la responsabilité inter-générationnelle, du clan...etc se faisait au risque de déresponsabiliser chacun sur le sort de sa vie ? Il fallait donc insister sur la responsabilité individuelle...
Eugène Burnand - L'Invitation au Festin  Eugène Burnand est un peintre suisse (1850 - 1921)

  • De quoi sommes-nous sauvés ?
En Jésus la mort est morte. Voilà de quoi nous sommes sauvés : de cette conviction déplorable que le ''péché'' est inévitable.
  • Qui nous sauve ?
« Car c’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, moyennant la foi. Ce salut ne vient pas de vous, il est un don de Dieu ; il ne vient pas des oeuvres, car nul ne doit pouvoir se glorifier. » Ep 2, 8-9.
De même que le Christ a sauvé le monde par sa foi active, de même nous collaborerons au salut de notre monde par notre foi active.
S'imaginer que mes actes de bonté ou de générosité puissent me permettre d'obtenir le salut, serait pécher contre l'Esprit... ! Et loin de Mt 10,8  « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement. »
Une autre aberration de cette idée du '' croyant qui cherche a obtenir le salut par ces propres mérites'' : est qu'il travaillerait uniquement à son salut personnel. Source de scandale pour un agnostique comme Camus...
Eugene Burnand - Le retour du fils repenti

  • Quel est ce ''moi'' qui est sauvé ?
Il reste à définir ce que je suis 'moi'... Qu'est-ce - de moi - qui sera sauvé … ? De mon corps, de mon intelligence, de mon tempérament, de mes défauts et mes qualités … Ce n'est pas si clair … ? ( Le Bouddhisme a une idée beaucoup plus précise de ce que 'je suis' )
Je n'aurais pas pu exister sans les autres … Depuis ma naissance, c'est par le regard d'autrui que je ''suis''... Je porte la présence de l'autre au cœur de moi-même... Je suis aussi, les générations passées, et bien sûr, ma mère et mon père, mes éducateurs … Ils sont 'beaucoup' de moi... que va t-il – d'eux – être sauvé … ? L'existence commune que j'ai avec mes proches et lointains ( ma culture, le fait que je sois né en France, et non au Niger …) a produit ce que je suis, avec des pensées communes, avec une religion … Qu'est-ce qui va être sauvé... Qu'est-ce de tout cela qui va ressusciter... ?
Eugène Burnand

Pour le Bouddhisme, l'homme prend conscience de sa nature spirituelle et découvre toute la différence qui sépare celle-ci de son vrai soi. La « Nature de Bouddha » ne définit pas véritablement la personne humaine, mais – en négatif – ce qu'elle n'est pas … L'illusion du « moi », est l'un des maux fondamentaux ( l'un des cinq Kleshas...) que nous devons combattre...
  • Qui est sauvé ?
« Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tim 2, 4). Et dans son discours aux païens, Pierre déclare dans les Actes des Apôtres : « Je me rends compte en vérité que Dieu n’est pas partial et, qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui (Ac 10, 43-35). Ainsi, le pluralisme religieux peut être considéré comme un dessein mystérieux de Dieu dont la signification dernière nous échappe.



Babel : « Dès l’origine, le dessein créateur de Dieu est un dessein de salut en Jésus-Christ. À cet égard, le mythe de la tour de Babel est plein d’enseignements. On le comprend généralement comme l’illustration du mauvais pluralisme qui n’engendre que la confusion et remet en question toute prétention à une vérité transcendante. Mais c’est rester à la face purement négative de Babel. Certes, Babel est le symbole de la confusion des langues comme châtiment de l’orgueil humain qui a cru pouvoir revendiquer une unité qui n’appartient qu’à Dieu. Mais c’est aussi le retour à la condition originaire de l’homme voulue par le Dieu créateur. Le Dieu de la révélation biblique est un Dieu qui bénit la multiplicité, ne serait-ce déjà que la multiplicité de l’être humain qui est créé homme et femme. Dieu bénit la multiplicité des peuples, des langues et donc des cultures. Comment alors ne permettrait-il pas ce phénomène inévitable de la multiplicité des formes religieuses ? » Cl. Geffré

jeudi 18 février 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-2/.-

La religion serait « un système de pratiques et de croyances »... Un prêt à penser, pour éviter de se perdre dans des questions oiseuses.. Une garantie pour ''après la mort'', un pari bon marché … Une identité, un ''entre-soi'' … ?
Selon les religions, la priorité ne semble pas la même : pour les uns : connaître Dieu, pour les autres agir selon le 'bien' et des règles définies ...etc

Et bien, cette fois-ci... On va dire que la religion c'est …. Un art de vivre !

Je ressens profondément, un rapprochement évident entre l'Art et la Religion ; et je ne parle pas de toutes les œuvres d'art inspirées ou produites par une idée religieuse... Non je parle de pratique, quotidienne, individuelle ou collective, anonyme …

L'Art, c'est transformer une matière – La religion, c'est transformer sa vie : une magie de l'ordinaire...
L'art c'est vivant, provoquant, beau – La religion, c'est vital, enjoué, beau...
L'art, c'est profond – La religion c'est, conversion, illumination
L'art c'est sans but, inutile – La Religion, c'est l'action dans la non-action, être là …
L'art c'est l'élégance, l'efficacité – la Religion, c'est la douceur, la paix, la conversion






L'art c'est l'innocence, l'habileté, l'insouciance – La Religion c'est la liberté, l'enfance, la confiance
L'art c'est la simplicité – La Religion c'est la simplicité
L'art c'est juxtaposer des opposés, le flou – la Religion, c'est le paradoxe, la question, le 'koan'
L'Art c'est le cerveau droit, l'intuition – La Religion, c'est l'insouciance, l'irrationnel, la poésie
L'Art c'est l'expression de soi, la découverte de soi – La Religion, c'est la ''Quête''...






L'Art c'est la créativité – La religion, c'est la foi
L'Art c'est une expression de soi – La Religion, c'est une expression du ''Soi'' ( l'Esprit)
L'Art, c'est : Voir, toucher, sentir, entendre …- La religion, c'est ''contempler, ''discerner'' …
L'Art c'est : ''aucun système'' pas de recette... - La religion, c'est '' le chemin '' sans tracé ...
L'Art c'est : l'équilibre, l'harmonie.. - La religion, c'est la voie moyenne, le juste milieu






L'Art c'est : l'Ouverture - La religion, c'est l'Ouverture.
L'Art c'est : la spontanéité - La religion, c'est la sincérité ( et vice-versa)
L'Art c'est : sans jugement – La Religion, c'est sans moralisme.
L'Art c'est : de qualité – la Religion c'est de qualité.
L'Art c'est : une discipline - La religion, c'est une discipline
L'Art c'est : la concentration, la perte du soi – La Religion, c'est l'abandon, devenir sans ego.






Etc... etc …

L'art de vivre :
Si dans l'art, on commence par une période d'apprentissage en copiant les maîtres, par exemple, En Religion, on dispose des croyances, des dogmes... Mais, l'objectif, et l'essentiel c'est la créativité, la Foi...

Il y a ce ''qu'il y a à faire'', si j'adhère ( compréhension, partage …) et '' comment le faire '' : les maîtres spirituels se prononcent sur le ''comment'' sachant qu'il n'y a pas une manière 'correcte' de le faire...

Dans cet objectif du ''Comment'', on peut isoler une dizaine de caractères propres à la Religion :

( à suivre...)


Sources : Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles ''

Les illustrations sont de: Christian Schloe 

lundi 15 février 2016

Les Tentations de l'Eglise

Jésus passe au désert, comme le peuple d'Israël, mais surtout comme chacun d'entre nous. Plus exactement, Jésus est « mis à l’épreuve » dans trois lieux différents : le désert, ''le ciel'' et dans la ville de Jérusalem.
Il lui fait affronter trois tentations : l’instrumentalisation de Dieu, le pouvoir et la toute-puissance...
De même l'Eglise -corps du Christ- que nous sommes ; nous sommes confronté à ces trois tentations, qui sont de toute religion.

- L'instrumentalisation de Dieu, consiste à échanger un culte contre le souhait de réalisation de notre volonté ; volonté toute matérielle, à l'image de notre vision... « L'homme ne vit pas seulement de pain ». Notre désir doit être au niveau de ''la volonté de Dieu'', «  Non pas ma volonté ... ».
L'exemple pourrait être le commerce des indulgences, qui caricature l'Eglise comme une institution qui agirait , « en tant que dispensatrice de la rédemption » ( droit canon) ..
Détail de Lucas Cranach Le Jeune,
La vraie et la fausse Eglise

- Le pouvoir religieux, pervertit cette notion politique qu'est le pouvoir, par l’idolâtrie qu'elle met en place, pour s'octroyer le pouvoir sur les esprits... Jésus, refuse obstinément d'utiliser cette représentation messianique et royale du 'Messie' qui prendrait le pouvoir... Dans plusieurs scènes des Évangiles, la foule enthousiaste veut le proclamer « roi » ou « Messie » : après le récit de la multiplication des pains (Jn 6), ou lors de l’échange qui oppose Pierre à Jésus, après la profession de foi de Césarée. À Pierre qui rejette la sombre perspective présentée par Jésus, ce dernier lui répond « Passe derrière moi Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais des hommes » (Mc 8).


- L'appel à la ''toute-puissance'' de Dieu, est sans cesse réclamée, par le religiosité des humains avides de signes miraculeux... L'institution religieuse peut jouer sur cette attente de « signes venant du ciel » par lesquels Jésus renouvellerait les merveilles de l’Exode (cf. Lc 11, Jn 6, Mt 16) pour « mettre (Jésus) à l’épreuve ». Face à cette requête, Jésus répond par une autre pédagogie, celle du mystère pascal contenu dans le signe de Jonas (Lc 11, 30)...

Lucas Cranach Le Jeune, La vraie et la fausse Eglise   (1546,  gravure sur bois, 0,35 x 0,58 m, Kupferstichkabinett)

vendredi 12 février 2016

Peut-on être sauvé tout seul ? -1/.-

Ou, le salut: 'Sauver' la création, et 'se sauver'

Je suis arrivé ( ou retourné) à la question du 'Salut' , par l'Ecologie … En effet :

- Notre tradition spirituelle, nous indique clairement que l'humain est l'intendant de la création. Les signes de temps agitent le chiffon rouge : l'humain est accusé d'avoir gaspillé les biens confiés ( nature et animaux ..). Nous les avons même détournés du patrimoine collectif, pour en faire un bien privé … Ne serait-il pas temps, pour notre survie, d'être assez avisés et de se rendre compte qu'on ne pourra pas – en matière écologique – se sauver seul … ? ( texte de l'évangile en référence : Luc 16, 1-13)

« Car les enfants de ce siècle sont plus avisés à l’égard de leurs semblables que ne le sont les enfants de lumière. »
Si un chrétien n'est pas sensible à la sauvegarde de la ''Maison Commune'', comment pourrait-il être crédible sur un discours concernant le ''salut'' de l'homme ? Ne serait-il pas alors qu'un discours égoïste, digne d'un intendant mal avisé … ?
Bien sûr cette parabole ( Lc 16, 1) n' a pas été construite pour nous donner une leçon d'intendance matérielle... Mais le pape François insiste bien sur le fait que « tout est lié ... » Notre environnement, notre développement, et le sens de notre vie ...
« Si donc vous n’avez pas été fidèle dans les richesses injustes, qui vous confiera les véritables ?
Et si vous n’avez pas été fidèles dans ce qui est à autrui, qui vous donnera ce qui est à vous ? »
Mon salut 'spirituel', c'est le pardon, la remise de mes dettes... Des « richesses injustes », car je ne le mérite pas... Je serais bien avisé, de me rendre compte que je ne peux pas me sauver tout seul …


La globalisation, et notre responsabilité collective envers la Création, va - peut-être - nous permettre d'entamer le chemin inverse à celui qui nous a conduit à un individualisme, même spirituel – qui consiste à penser pouvoir ''sauver son âme'' pour soi … !
Puis-je être ''sauvé '' tout seul … ? Bien sûr que non ! Il y a tout ce qui a fait que je suis moi, et non un autre, qui me ''sauve'' … Si je n'avais pas eu ces parents, cette éducation … Si je n'avais pas rencontré un(e) tel(le)... ? Si je n'avais pas eu ce confort... Et si j'étais – enfant - mort de faim, au Nigéria... ? Je suis ''sauvé'' avec tous ceux qui font ce que 'je suis' …
Et ce que je dis des hommes et femmes, dont je suis issu ; je peux le dire de mon environnement, de ma Terre... ( ça pourrait être long …)

Pour rire un peu … Je pourrais dire – c'est une caricature - ... A quoi cela me sert -il d’être sauvé, si ma femme ne l'est pas avec moi... Et, elle pourrait ne pas l'être, avec tous les défauts qu'elle a … !:-)))...


Pour aller encore plus loin dans le paradoxe : Je pourrai dire :
Si je suis un avec le Christ, comment pourrais-je accepter d'être ''sauvé'' si mon prochain ne l'est pas … ? !

Si je suis un avec le Christ, comment pourrais-je accepter d'être ''sauvé'' si le monde, si le vivant... si L'univers ne l'est pas … ? !

lundi 8 février 2016

Une lecture Zen des Evangiles.-1/.-

La très grande force du christianisme, c'est cette suite de quatre textes appelée Les Evangiles... Des textes, qui remis dans leur contexte et contemplés aujourd'hui, sont d'une extraordinaire et bouleversante 'nouveauté' ...
Le plus grand danger est de lire ce texte avec nos représentations habituelles. Il m'a toujours été éclairant de le lire à la lumière d'autres spiritualités... Plus habituellement, on relit Les Evangiles, avec l'accompagnement d'auteurs catholiques : Zundel, Varillon ..etc Ou d'auteurs réformés, ou juifs … Personnellement, mes véritables étincelles spirituelles, je les connais avec un regard bouddhiste. Et, précisément ma dernière lecture concerne un livre de Kenneth S. Leong, ''Une lecture Zen des Evangiles ''

- Kenneth S. Leong est né à Hong-Kong et a été élevé dans le christianisme anglican, il découvre à l’âge de seize ans, le Tao, le Zen et Krishnamurti. Bouddhiste, il enseigne la méditation et participe au dialogue interreligieux aux États-Unis.
Thomas Merton
and the Dalai Lama
in India, 1968
- Bernard Durel, dominicain connu et membre influent du dialogue interreligieux, qui pratique aussi la méditation zen, en a écrit la préface, il dit : « Lorsque je l'ai découvert en anglais, j'ai lu ce livre avidement... Sans que je l'aie vraiment cherché, ma foi en a été déplacée, enrichie, provoquée. »
( Au mois de mars, je me réjouis de pouvoir suivre une session Zen, avec B. Durel à St-Jacut …)

Qu'il soit bien clair, que cette lecture n'est en rien ''syncrétiste'', ou ''relativiste''. Le lecteur, lui, bien sûr, est 'singulier', avec son histoire, sa recherche, son chemin... J'ai aimé le chemin pratiqué jusqu'ici, et quelles que soient les langues pratiquées au cours d 'exotiques traversées, la spiritualité chrétienne a toujours été ma langue maternelle et d'usage ; et la Bible mon Livre 'fondateur', et qui regroupent mes mythes fondateurs, existentiels …

Pour vivre de la Parole du Christ-Jésus, il est nécessaire, à mon avis, d'enraciner sa lecture dans notre temps, proposer une actualisation, rechercher même de nouveaux paradigmes, pour découvrir ce que pourrait être une spiritualité d'aujourd'hui... Je pourrais ajouter que ''l'on soit croyant ou pas '' ; parce que le vocabulaire attaché à cette notion de croyances ( « croyez-vous en Dieu … ? » etc) est la plupart du temps inapproprié …
Le mot ''Dieu'' est un piège : s'il représente une image, ou une ''idée de'' ; il se dénature lui-même, s'auto-détruit... Je préfère parler, du ''Dieu'' d'Abraham, du ''Dieu'' de Jésus''... Du ''Dieu'' de mon expérience... C'est beaucoup plus « flou » … C'est dommage, me diriez-vous.. ? Et bien, précisément : non … ! Et, je vais essayer de me justifier …

Pour lire, les Evangiles, il faut une certaine dose d'humour, d'irrespect... Il faut s'attendre à rencontrer le paradoxe, et l'irrationnel, mais aussi le doute et son contraire …
Si je pars de mon expérience, je rencontre au départ ''l'absurde'' ; et déjà ce sentiment ne se soumet pas à la tyrannie de la raison... Et, pourtant, je vais tenter d'être ici, le plus rationnel possible ; alors que je sais que comprendre les Evangiles c'est commencer par regarder leur poésie, juger de la vérité de l'instabilité du propos...
L'exercice est difficile. Le ''Dieu'' de Jésus n'est pas solennel ; et Jésus est la plupart du temps 'irrévérencieux' … Nos 'objets sacrés' sont nos idoles.
« Un exemple concret est l’idolâtrie à propos des paroles de Jésus que l'on prend au pied de la lettre plutôt que sous leur aspect symbolique » K. S. Leong
Les versets du sermon sur la montagne( Lc 6, 20-23), sont à lire au présent, et le futur annonce la nécessité et non ce qui se passera … !
Oui, le ''Royaume '' est beau et mystérieux … Il est accessible dès maintenant, il est « à notre portée »... Jésus nous l'enseigne, en éveillant l'artiste qui est en nous...
Je vois le miracle comme un signe pour nous émerveiller, nous surprendre, nous ''éveiller'' … Mais, qu'importe le signe …

Il serait bien plus ''fort'' de m'émerveiller de la '' magie du quotidien'', si j'en avais la profonde connaissance. Les Evangiles nous ouvrent à cette connaissance, quand elles ne sont pas brandies comme un talisman, un livre infaillible.. etc.
 Les Evangiles nous ouvrent à cette connaissance quand notre lecture entre en résonance, cœur à cœur... et quand nous avons compris que ce Jésus, - qui nous demande de prendre modèle sur des petits enfants, plutôt que sur des religieux ( aussi sincères que pouvaient l'être les pharisiens …) - que ce Jésus, donc, ne prêche pas les feux de l'enfer... «  La religion de Jésus est 'naturelle' ; sans trace d'artificiel ou de spiritualité contrainte » K. S. Leong
Jésus n'est pas laxiste, mais il n'est pas un moraliste, il ne se fait pas le champion de règles... « Qu'est-ce qui souille un homme ? »
Quand on demande à Jésus, quel est le plus grand commandement de la Loi, il répond « Vous aimerez le Seigneur notre Dieu de tout votre cœur, avec toute votre âme et votre esprit. »... Ce qui est ''drôle'', paradoxal, c'est que l'amour ne peut être commandé … ! Il eut été plus légaliste, plus sérieux, de répondre qu'il est commandé de suivre en tous points ''la Loi'' .. ! Point !

Un récit illustre parfaitement la notion de moralisme chez Jésus : Mat 26, 6-13.
Une femme, Marie de Béthanie ( chez Jean) ''gaspille'' trois cent deniers ( le salaire annuel d'un travailleur!) pour les répandre en parfum sur le corps de Jésus … ! Et devant la réaction indignée des disciples, il répond : «  C'est vraiment une bonne œuvre qu'elle a accomplie pour moi ».. !!

Pour lire les Evangiles : «  Ce qui est important, c'est de mettre de côté nos connaissances traditionnelles et nos préjugés et de commencer par un esprit de débutant. » K. S. Leong

( à suivre...)

vendredi 5 février 2016

La vie de Jésus: James Tissot -2/2-

La vie de Notre-Seigneur Jésus Christ par James Tissot


INTRODUCTION.


« A mon retour de Jérusalem, en mars 1887, j'allais voir mon père, chrétien de vieille souche et catholique fervent.
Je lui montrais mes croquis, mes esquisses et tous les documents que j'ai rapportés d'outre-mer. Quand il vit l'aspect et les proportions exactes des lieux, du Golgotha en particulier, il s'écria : " Il faudra donc que je change toutes les idées que je m'étais faites sur ces choses. Comment ! le Calvaire, n'était pas une haute montagne en pain de sucre couverte de rochers et de broussailles ?

- Eh bien, non, lui répondis-je ; le Calvaire, tout en occupant le haut de la ville, n'avait que six ou sept mètres de haut tout au plus. De même le Saint-Sépulcre se trouvait à côté, dans des conditions tout autres que celles que tu te représentes. Ton erreur est semblable à celle de la plupart des fidèles. Le monde chrétien a depuis longtemps l'imagination faussée par les fantaisies des peintres ; il y aurait tout un stock d'images à expulser de son esprit, pour l'établir dans des données se rapprochant un peu de la vérité. Toutes les écoles out travaillé plus ou moins consciemment à égarer sur ce point l'esprit public. Préoccupées uniquement les unes de la mise en scène, comme les écoles de la Renaissance, les autres du sentiment, comme les écoles mystiques, elles délaissaient d'un commun accord le terrain de l'histoire et de l'exactitude topographique. Ne serait-il pas temps, dans un siècle auquel l'à-peu-près ne suffit plus, de rendre à la réalité, je ne dis pas au réalisme - ses droits usurpés ? . . ."



Voilà pourquoi, attiré que j'étais par la figure divine de Jésus et les scènes si attachantes de l'Evangile, souhaitant en rendre, autant qu'il me serait possible, les différents aspects, je me décidais a partir pour la Palestine, à la visiter en pèlerin recueilli. Ne fallait-il pas étudier sur les lieux mêmes la silhouette des paysages, le caractère des habitants, et tâcher de retrouver, sous les couches multiples des générations disparues, le type des races et les matériaux de l'antiquité !

 



Je partis le 15 octobre, 1886. J'avais juste cinquante ans.

Arrivé en Egypte, je me rendis compte aussitôt que je n'avais pas de désillusion à craindre ; Alexandrie et le Caire me dédommageaient déjà amplement de mon voyage, en me donnant l'impression directe de l'antiquité.

Avec de pareils documents, il me semblait presque inutile d'aller plus loin ; l'antiquité était là palpable, et il me paraissait aisé de la nettoyer de la couche légère de modernité qui la couvre, pour arriver de suite aux vestiges des anciens temps. Pourtant, quand, j'arrivais en Palestine, l'impression fut différente ; je sentis que l'Afrique n'était pas tout l'Orient; que là, la race, les mœurs, les matériaux des villes, à plus forte raison les paysages, le sol, tout était différent. Quand je montais plus au nord, à partir de Nazareth, au Liban et à Damas, je sentais ]a présence de la race turque, c'est-a-dire l'homme venant du nord, apportant ses mœurs, sa sensualité, ses costumes spéciaux, formés d’étoffes doublées de fourrures et chargés de broderies nécessitant un tout autre ajustement. - Je me formulais alors, par la comparaison entre le nord et le midi, une idée plus ample, plus précise, du pays judaïque.

 

Quant aux constructions, le caractère général en était tout aussi frappant. En Afrique et dans le nord de la Palestine, où le bois est employé, la construction, le décor des maisons et des édifices est tout autre qu'en Judée, où le bois manque, où il a toujours manqué, puis qu'on le faisait venir du Liban pour les palais et les parvis du temple. Chaque maison était voûtée en dôme, et ce dôme restait apparent au-dessus du toit; de là, en Judée, cette quantité de petits dômes qui contraste avec les toits plats des villes du nord et du midi.

Toutes ces données générales me mirent sur la voie des études que j'avais à faire. Restait l'intuition à se développer. Toute oeuvre, quelle qu'elle soit, a son idéal ; le mien a été la vérité, la vérité dans la vie du Christ.

Rendre avec fidélité et faire revivre sous les yeux du spectateur la personnalité divine de Jésus, dans son esprit, dans ses actions, dans toute la sublimité de ses enseignements, quoi de plus séduisant ? quoi de plus difficile aussi? Il a fallu m'identifier le plus que j'ai pu aux Evangiles, les relire cent fois, et en vérité c'est bien là, sur les lieux mêmes où se sont déroulées toutes ces sublimes scènes, qu'on se sent plus apte à en saisir, à en recevoir toutes les impressions. ......

Maintenant que mes méditations ont pris corps, et qu'après dix années de labeur cette nouvelle vie de Notre-Seigneur Jésus Christ va paraître avec le caractère de précision des choses vues et vécues, je viens dire ceci. Je ne prétends pas affirmer que les événements que je rappelle se soient passés exactement ainsi; loin delà j'ai voulu seulement fournir une interprétation personnelle basée sur des données sérieuses, et destinée à écarter au tant que possible l'incertitude de le vague des esprits.

J'ai accompli ainsi, je l'espère, une oeuvre utile, j'ai fait un pas vers la vérité et posé un jalon qui indiquera le chemin à suivre pour pénétrer plus avant dans cet inépuisable sujet. Si quelqu'un veut a son tour l'étudier et le préciser davantage, qu'il se hâte ; car les données encore existantes, les documents survivants aux siècles disparaîtront sous peu de temps sans doute, envahis, en ce temps d'ingénieurs et de chemins de fer, par l'irrésistible poussée de la modernité débordante. »

James Tissot.

Voir Aussi:



mardi 2 février 2016

Foi et morale, ça se discute !

Tentons quelques mots, quelques propositions, que je voudrais ''rationnelles''..! ?

C'est difficile de parler de ''morale'' surtout dans le contexte catholique... Disons plutôt qu'il est difficile de se faire entendre …
Foi, Morale et Liberté : est-ce conciliable … ? 

- Dire que le préservatif ou la contraception sont interdits est inaudible, et sans intérêt... !

Les Lumières...





- Parler de l'union conjugale – sans parler d'interdits – mais, dans un contexte chrétien est déjà plus intéressant … Se demander ensuite si de cette réflexion en découle une exigence morale... Pourquoi pas ?
Au fond , n'est-il pas naturel qu'une réflexion spirituelle débouche sur une question morale ? Ou du moins éthique... ? Je mets sur le mot ''morale'' un ensemble de normes ; et sur le mot ''éthique'', un ensemble de ''bonnes questions'' sur la bonne attitude …

Ma religion catholique est une tradition, elle a construit bien avant ma naissance une réflexion sur la foi, une théologie, des rites, une morale ...etc. Avant de tout détruire, tout refaire... peut-être est-il intelligent de connaître la tradition que mes ancêtres m'ont léguée, et peut-être même transmise …
Une image qui se réfère à une '' Tradition '' ...

Pour en revenir à cette norme ( morale), l'Eglise me dit qu'elle se réfère à une ''loi naturelle''... Cette ''loi naturelle'' serait plus qu'une construction métaphysique : « C’est l’exigence que l’intelligence aperçoit dans la nature des choses. ». P. J. (*) La loi naturelle, ce serait : Ce que chacun d'entre nous peut faire ''naturellement'' pour le bien de son prochain … Je dirais, que j'y suis porté par ma nature raisonnable : « notre nature, c’est d’être raisonnable ! » P J.

Supposons donc, que dans des conditions ''normales'' de vie, l'humain est amené à se demander ''naturellement'' : « Qu'est-il bon de faire ? »
Cette disposition à faire le bien et à éviter le mal, est appelée une ''vertu''. Dans la tradition chrétienne, les vertus morales ont pour objet les actes humains conformes à la droite raison. Elles ont en commun le ''juste milieu'' (in medio stat virtus) entre les excès opposés. En effet, il existe quatre vertus morales principales: la prudence, la justice, la force et la tempérance. Ce serait trop long d'entrer là ...
Donc, nous parlons de ''loi naturelle '', appuyée sur des vertus, qui comme les vertus théologales (Foi, Espérance et Charité) sont ''données'' par Dieu, du moins attachées à notre humanité ...
Je reviens à ma question 'morale' : « Qu'est-il bon de faire ? »
D'abord les faits... : Pour que mon jugement moral soit objectif, il doit être tiré du réel devant moi... Mais … Ce ''réel '' , n'est-il pas précisément une interprétation de mon regard... N'est-ce pas moi, sans influence, qui donne sens à ce que je vois, et qui donne sens à mon action... ? Dans ce contexte, le ''Magistère'' n'est qu'un élément de ma recherche de sens ….
A moi, de juger, de ressentir, de discerner si mon action est bonne... Par exemple, face à l'interdit du meurtre, je peux en appeler à ma ''légitime défense'' …
La loi n'a qu'une fonction indicatrice... Face au réel, ma conscience est une intelligence qui cherche à juger du ''bien''.

Réflexion causée par un article autour de : Pascal Jacob '' La morale chrétienne, carcan ou libération ?''
Ilya Repin - Liberté